
Voilà, plus que 4 semaines. Un mois déjà vécu ici. Tant de beauté, de surprises et de rencontres. Nous avons ressenti peur, joie, surprise, émerveillement, euphorie, angoisse, amusement, magie, agacement, bonheur, tranquillité Autant de mots que de lieux, de personnes et de situations. Ce voyage initiatique qui se poursuit dans ce que Romane appelle tout en drôlerie et en affection : » Freaky Ottawa ».


Hier, le réveil était tranquille. Je m’habitue à cette grande maison qui ne me fait plus peur. Je ne me sens toujours pas très bien dans certaines pièces, mais je m’en accommode. Nous nous sommes aventurées dans le sous sol pour laver notre linge. Un amas d’objets ayant bien vécus et pouvant abriter autant d’esprits et de monstre en tout genre que possible sont présents.
En ville, les monuments ressemblent à ceux du Ministère dans Harry Potter. Encore une fois, tout semble aller dans le sens de « Freaky Ottawa ». Il fait meilleur temps niveau humidité mais le froid reste mordant. Nous avons pour objectif de la journée de faire trois des cinq circuits touristiques de la ville et aller au cinéma Imax. Ayant déjà bien erré dans la ville, nous nous permettons quelques raccourcis. Sans pluie et avec quelques rayons de soleil, la ville est de suite plus accueillante. Je me réconcilie peu à peu avec.







Le parlement fait écho à celui de Londres. Un doux mélange britannique et de petites villes américaines. Après la colline du parlement, nous longeons le canal et traversons plusieurs parcs encore fleuris où trônent de nombreux Mémorials. Nous croisons le chemin de deux autochtones natives qui engagent la conversation. Nous les faisons répéter en français pour être sûres de comprendre. Elles nous questionnent sur nos connaissances sur la situation actuelle des autochtones. Après la visite du musée d’hier, j’ai honte de ne pas parvenir à synthétiser ma pensée sur le sujet. C’est délicat de parler sans tabous aux premiers concernés en tant qu’étrangère blanche européenne. Je me sens concernée sans l’être. Préservation de la culture, intégration dans l’actualité et problèmes que nous n’avons pas en France sont les principales thématiques abordées. Nous avons désormais un badge » Racines Canadiennes » Roots, le mot de ce voyage. ( note 2022 : Je n’ai plus aucun souvenir de l’allure de ce badge et me demande ce que j’en ai fait…) L’échange se termine par une belle invitation à un Pow wow auquel malheureusement nous ne pourront assister, nos billets de bus étant déjà réservés pour la prochaine étape. Gros regret de ce séjour.

Roots – le mot du voyage
J’ai commencé à chercher la traduction de « racines » car j’avais une grosse envie de me faire teindre les cheveux ici. Depuis que je suis tombée sur le mot roots, je le croise partout : les enseignes de magasins, les boissons, les brochures, les chansons… Est-ce un signe pour que je retrouve un jour les miennes, de racines?
J’appartiens à partout et ailleurs mais je suis attachée à ma belle Normandie par le cœur.
Ces soirées musicales dans la cuisine de cette grande maison à rédiger mon carnet et refaire le monde avec Romane restent imprimées en moi.
J’ai une envie irrépressible de changer de tête. Comme pour marquer les changements intérieurs à l’extérieur. L’illustration de Ô combien le Canada me fait sentir bien, vivante, heureuse. Prendre conscience qu’il faut prendre soin de soi son mental, son corps et ses émotions. (Note 2022 : un discours qui ressemble étrangement à celui que j’ai aujourd’hui, mais que j’avais terriblement perdu de vue ces 6 dernières années.)
En ces premiers jours d’Octobre, le ciel est bleu, nous faisons une balade à Gatineau, les boutiques. C’est une marche dans un froid hivernal. Ce soir, match des Redblacks d’Ottawa vs Alouettes Montréal. J’ai du mal à réaliser que je m’apprête à voir un match de hockey dans le pays de ce sport. Une expérience incontournable.
Incontournable…. Mais râtée !

02/10/15 Ottawa
Effectivement, je ne sentais pas le match de hockey puisque nous n’avons pas réservé un match de Hockey mais un match de football américain ! Demande lost in translation au guichet, visiblement le Hockey n’était pas dans notre budget. Nous nous en sommes aperçues une fois assises dans les gradins, médusées devant la pelouse bien tondue. Heureuses malgré tout d’être là, de vivre une expérience à l’américaine. Une opportunité de vivre un match dans l’ambiance sur le continent où est né cet « Entertainment« . Tout autour, le public est aux couleurs des Redblacks. Les mascottes en forme de flamme, de bûcherons et de panda dansent. De part et d’autre du terrain, les Cheerleaders réalisent des chorégraphies de haut niveau. J’ai l’impression d’être dans un film. Un casque géant est gonflé à l’autre bout du terrain. Des feux d’artifices explosent au dessus des tribunes. Un avion passe au raz des gradins. Ce monde est fou. Les nord américains ont un sens du spectacle très développé. La musique est forte.



Je peine à comprendre les premières actions. Peu à peu, j’intègre les façons de gagner des points. Je regarde les règles et les termes au retour sur internet, histoire de bien les ancrer (note 2022: je ne m’en souviens pas..). La manche qui donne l’avantage à l’attaque : first down. Trois façons de marquer : l’équivalent de l’essai au Rugby plaquer l’attaquant porteur de balle au sol, maquer entre les buts. Partie en quatre quarts de quinze minutes. ça me fascine, les joueurs sur le terrain. Les casquent brillants, les corps qui s’entrechoquent, les hourras des tribunes. Les sloggans des cheerleaders. Devant nous, le sosie du capitaine Mouche dans « Hook » nous explique les règles et le jeu dans son accent à couper au couteau et nous avons bien du mal à tout saisir, sans compter sur le bruit ambiant. Les trois chicots accrochent mon regard. Celui que nous prenions pour un esseulé lourd devient une présence agréable et sympathique. Si gentil et attentionné pour deux petites françaises qu’il ne connait pas. Devant le visage congelé de Romane, il lui tend son propre gilet polaire aux couleurs de l’équipe qui, sur Romane, ressemble à un plaid géant. Avant le dernier quart temps, il s’éclipse. Nous hésitons à partir nous réchauffer à la maison. Il nous a demandé de surveiller ses affaires… Quel surprise et bouleversement du coeur quand il reparait avec non pas une mais trois tasses, deux chocolats chauds pour nous! L’un des meilleurs de ma vie! La chaleur revient dans tout mon corps, si revigorante. C’est aussi l’élan de générosité et ce geste gratuit qui me réchauffe. Je cherche comment le remercier, mais à part le plus large sourire et toute la reconnaissance du Monde dans mes yeux, je ne sais que faire.
Les Redblacks ont gagné sans surprise. Nous entendons encore l’agitation du stade depuis la maison. Dernière nuit ici.
Sur le pont hier, j’ai senti la rembarde vibrer et j’ai vu mon ombre dans les courants de l’Outaouais. Je me suis dis que la vie ne tenait qu’à peu de choses, une construction au dessus de l’eau glaciale. Et je me suis sentie vibrante de vie.
2ème queue de Castor au Beurre et à l’érable, délicious!