Toi, l’autre en moi

Un sujet plus lourd, mais je pense que mon hypersensibilité, outre les dysfonctionnements dans ma construction me rend plus disposée à la dépression. Voici un texte de 2011. Un texte qui essaie tant bien que mal de relater ce qui me traversait. Le vide intersidéral et l’envie de me vomir et de mourir.

« L’autre en moi, 

Que veux tu me dire, toi, l’autre en moi. Je sais que tu es là, à me faire souffrir. Je te sens et je te ressens jusqu’au plus profond de mon être. Tu te découvres à moi en me recouvrant et en m’inondant de douleur. Une douleur indicible qui ne ressemble à aucune autre. N’es tu que cela? Une boule d’angoisse et de douleur, nichée au creux de moi, se répandant comme un poison toxique et dévastateur dans mes membres m’empêchant de bouger, dans mes poumons m’empêchant de respirer, dans ma tête m’empêchant de penser. Tu as toujours été là, à mon insu, comme un parasite et pourtant intrinsèque à moi-même. Tu es moi et je suis donc toi. Ou bien tu es de moi et je suis de toi. Nous nous appartenons l’une à l’autre. Tu es probablement mon alter ego, mon autre moi. Nous nous serions créées l’une à l’autre, comme Eve fut créée pour Adam, de la même chair, indispensables l’une à l’autre pour perdurer. Mais es tu réellement nécessaire à mon être?  En quoi m’aides tu? Pourquoi se manifester soudainement à moi de manière si violente, si abrupt?

Qui es tu? Tu es moi? Un moi qui me serait étranger pourtant. Un moi qui me tue. Nous sommes liées l’une à l’autre et je ne sais qui tu es. J’en ai une vague idée, mais je n’arrive pas à la saisir, à t’attraper. Mon alter ego, mon autre moi, mon inconscient, mon Ça, ma chambre noire, mon débarras, ma maison close, mon amnésie… Je ne sais quel nom te donner, tout ceux là te vont bien. Mon autre moi comme j’ai appris aujourd’hui que tu l’étais. Mon inconscient et mon Ça Freudien, à la limite du Surmoi pour te visionner d’une manière plus philosophique et psychologique, les autres appellations pour mettre en valeur ce que tu représentes pour moi et en quoi tu m’es nécessaire. Tu es ma partie sombre et celle qui me permet de fermer les yeux sur certaines choses. Tu gardes dans  les recoins de mon âme ce qui m’échappent ce que je ne supporte pas, tu abrites discrètement mes pires pensées et pires actions dans l’obscurité, tu accueilles tout ce que ma conscience à tous les degrés rejette. Jusque là, je t’imaginais, si j’osais penser à l’idée étrange d’être plusieurs en moi même, comme un ange gardien, une présence bienveillante, une protection, un échappatoire, un instinct brillant. Peut être que même plus jeune, tu m’es déjà apparu, et dans de vagues souvenirs, je peux me remémorer des soulagements à t’avoir en moi, une complicité sur nos petits secrets et une gratitude pour m’épargner de la dure vie d’adulte. Mais aujourd’hui, je te considère différemment et j’ai peur. Tu es un Mister Hyde enchaîné. Tu es un portrait de Dorian Grey interne. Et tu me dévores de l’intérieur. 

Tu ne me considères plus comme la petite fille que j’étais et tu ne me protèges plus. Ou je ne comprend pas ta façon d’agir. Peut être est ce provisoire. Mais j’ai perdu la raison, ou tu n’as plus de logique à mes yeux. Tu as soudain fait apparition à moi-même, ma conscience, de manière assez vicieuse et sournoisement, tu me détruis. Dans un moment décisif de ma vie, une période de changements importants, de maturité et de possibilités. Une période qu’on aime à se remémorer pour les expériences sociales, intellectuelles et les décisions prises en cet entre-deux à l’aube de l’âge adulte. Je m’en rappellerai désormais non pas pour ces choix et ce moment à moi, cette pause avant le grand saut, mais à cause des stigmates que tu laisses en moi. Ta présence se matérialisant par les angoisses, les tremblements, les crispations, les pleurs, le manque d’air, les tempêtes de sentiments contradictoires et violents au fond de mon être, les doutes et les incertitudes, la perte totale de toute raison et objectivité, me tord, me ronge, me mord, me dévore, me détruit et m’anéantit.

Tu t’imposes subitement et  m’interdis pour l’instant toute prise de décision, toute réflexion sur l’avenir, ce que j’ai à faire à court ou long terme. Tu me prends en otage, et décide de détruire ma vie. Je suis prise au piège de moi même et m’abandonne peu à peu, n’ayant plus grand pouvoir sur ma personne. Je ne me sens plus maître de rien. Et c’est avec désespoir, douleur et frustration que je te sens à travers moi réduire à néant mes proches. Tu fais de moi un monstre. Une loque colérique, une chiffe frustrée, un boulet triste, quelque chose de laid. Je sais que nous sommes deux et que tu as pris le pouvoir, quand je pense non et que déjà la colère qui s’est inscrite en moi par je ne sait quel moyen s’élève déjà de ma propre bouche, quand tu repousses tous mes amis, ma famille, quand tu les blesses autant que tu me blesses à l’intérieur. Et pourtant c’est moi. Je détruis complètement les gens que j’aime, l’équilibre familiale à cause de toi, et je n’arrive pas  à lutter. 

Je sais que tu es désormais comme mon passager sombre, une présence malveillante et misanthrope qui soudain s’est éveillé en moi. Car depuis que tu loges en moi de manière plus affirmée et violente, je me sens encore plus mal que tu ne me rends, en présence des autres. Les autres, ces autres que j’aimais tant, ces autre proches ou inconnus, que je voulais aider, rencontrer, avec qui je voulais partager tant d’expériences humaines. Désormais, je me sens étrangère à eux. Je ne suis plus comme eux, tu m’écartes peu à peu du troupeau et je me sens suffoquer dans la foule où, autrefois je me prélassais avec empathie, amour et espoir. Je faisais partie de l’entité du commun des mortels, de l’Humanité dans son état primaire. Aujourd’hui je ne suis plus que mortelle dans un état de douleur primaire, à l’écart de tout, isolée à l’intérieur de moi même. Je ne me reconnais plus dans le regard des autres, je me sens comme transparente et comme une opaque brique jetée dans une flaque d’eau où toutes les molécules sont soudées et que je disperse. Comme un chien dans un jeu de quille. L’intruse, l’erreur. Je n’appartiens plus au groupe des hommes que j’aimais temps. Je ne supporte plus leur présence que je réclamais avant. Avant que tu n’arrives. Avant que tu te manifestes. Avant que tu règnes en parfait tyran sur moi. Et je ne peux à l’heure actuelle que te ressentir et te subir. 

C’est comme une schizophrénie consciente. Comme si je pouvais dialoguer avec toi, l’autre moi. J’essaie de te connaître, de te comprendre. En vain. Car tu ne me réponds que par tes manifestations douloureuses à mon être et je ne sais pas. Je ne sais plus rien. Je sais seulement que tu es là, à ne plus rien me faire savoir d’autre que ta présence en moi d’une manière vicieuse et cruelle. Je me sens agressée de l’intérieure. Tu t’imposes et persistes.  Je te sens et te ressens, continuellement et inlassablement, de manière constante, et si par miracle tu t’assoupis et me laisse quelques instants de répit, même si je te sens juste gronder en moi, comme un orage au loin, ce n’est que pour plus te sentir éclater sur moi par la suite. J’ai mal, tu me fais mal. Pourquoi. Tu me plonges dans une torpeur sensible, je suis à fleur de nerfs, une boule de stress, une bombe à retardement qui menace à tout instant d’éclater ou pire et plus exactement, d’imploser. Que tout craque à l’intérieur mais que les débris restent, et continuent de s’attaquer à ce qui resterais de ma personne. Je ne serais alors plus que l’ombre de moi même, je serais toi, tu aurais triomphé de moi et règnerais en maître absolu sur mon corps, m’agitant à ton gré comme un pantin sans plus aucune résistance, tentative de lutte ou d’évasion. 

Tu t’es déjà préparé à ma rébellion. Depuis que tu es en moi tyrannique et sadique, je ne peux plus rêver. Je ne peux pas m’évader. Les romans que j’inscrivais dans ma tête l’espace de quelques minutes, quelques heures pour m’endormir, passer le temps dans les transports, ces histoires où j’étais l’héroïne d’un récit totalement exclusif ou le personnage secondaire imaginaire d’un de mes films ou romans préférés qui me faisaient sentir si bien si légère, à des kilomètres au dessus des nuages, me sont désormais hors de portée. Je ne sais plus m’abandonner à la rêverie éveillée. Cet espoir qu’un jour je puisse imaginer une histoire suffisamment novatrice et puisse me souvenir des détails m’aillant percutés en les pensant et procurant toute la force au récit pour écrire s’envole loin de moi. Toi, l’autre en moi aspire ma créativité. Toi, l’autre en moi, me vampirises sans scrupules. Tu m’enlèves tous les plaisirs de la vie que j’avais. Tu me prives d’avoir envie. Seule l’envie d’avoir envie persiste, mais pour combien de temps encore? Tu me cloues au sol, et m’attire sous terre, je ne peux plus décoller. Je perds toute productivité, je ne me rappelle plus de rien, j’ai toujours envie de dormir même si tu me réveilles au beau milieu de la nuit par des crises d’angoisse et de pleurs ou me donne des insomnies persistantes. Et je ne peux lutter. Je voudrais juste dormir. 

 Tu m’alourdis le ventre, pèse sur mes poumons me privant d’air pur pour respirer, vivre et tu me passes une corde au cou que tu sers régulièrement pour me faire comprendre que tu as le contrôle de ma vie actuellement, le pouvoir de me faire souffrir. Ton oppressante présence ne me quitte plus. Dès le réveil, avant même de me remémorer quoi que ça soit, tu es là, je te sens au creux de moi et déjà je chavire et menace de sombrer. Es ce toi qui m’aurais soufflé au creux de l’oreille, qu’étrangement, je pouvais comprendre les gens se suicidant au somnifère? C’est à cause de toi que cette réalité m’est apparue. En effet, quand je dors, tu dors aussi. Tout est calme. Tu es loin en moi, si loin que c’est comme si tu n’existais plus, n’avais jamais existé. Je ne souffre plus dans le sommeil. Je peux donc comprendre ceux qui n’ont pas envie de se battre, ceux qui ne tiennent même plus à leurs proches et à la vie, qui n’ont plus rien excepté leur douleur qui les retiennent à la vie, je comprends qu’ils souhaitent le sommeil éternel. C’est le suicide le plus sensé qui me paraisse. Mais non, tu ne m’auras pas comme ça. Je t’apprivoiserai ou tu me quitteras, mais je ne mourrai pas pour te faire mourir sache le, toi l’autre en moi, la boule d’angoisse, mon Ça. Tu n’auras pas raison de moi, je t’aurai, je trouverai le moyen d’une entente, de ton départ, mais pas cette voie là. J’aime trop mes proches, j’aime trop la vie, j’ai juste ce qu’il faut de narcissisme pour m’aimer, sans vouloir en finir avec moi même. Tu me blesses, me violente à l’intérieur, mais tu ne me tueras pas au sens propre. 

Que veux tu me dire, toi, l’autre en moi, je sais que tu es là à me faire souffrir. Et je te dis non comme je dirais non à un caprice d’enfant. C’est la colère que tu fais couler dans mes veines à présent. J’étais victime de tes colères, et tu m’y pièges encore trop souvent, mais désormais, le combat entre toi et moi se fait plus violent car je riposte. Mais mon animosité que tu provoques me fait aussi mal que celle que tu déverses contre moi et je me fais mal dans des foudres qui se lancent au hasard, et s’écrasent en moi comme un poids supplémentaire à ta présence. Mes foudres me frappent là où déjà tu rognes, et s’abattent sur mon entourage bienveillant, écopant de ma fureur à ta place. Tu fais régner la tempête en mon être autrefois si calme et paisible. Tu réveilles mon impétuosité et mène à ébullition la fureur en moi. Je ne suis plus qu’une boule de nerfs, un être de douleur et d’agressivité. Contre toi, contre moi, contre nous. Mais il n’y a pas que nous qu’elle atteigne et cela me révulse encore plus. 

Et je souffre, tu me fais souffrir de culpabilité parmi tes nombreux coups. Et je me referme, peu à peu, je m’enfonce dans ta noirceur, et je me retire de la vie des autres, de celle de mes amis, et du mieux que je peux de celle de ma famille. Car ils sont tous lumière et pureté. La vie et l’espoir. Je ne veux surtout pas que cette noirceur, que toi l’autre en moi, passager sombre, atteigne leur clarté et éclipse toute leur joie. Je ne tolèrerai pas que ton coup de blues entache et atteigne leur lumière. Ne prend qu’une vie à la fois, tu as déjà la mienne. Je me sens disparaître dans ce halo de noirceur que tu répands autour de nous. Désormais, mon écart n’est même plus volontaire pour les protéger, tu m’y soumets pour m’empêcher de me sauver. Et c’est alors que je m’aperçois que la lumière du reste du monde m’ébloui, et c’est dur d’y rester. Au milieu des gens, et garder ma place dans la société. Tu me mets au banc des marginaux, des ratés, des exclus. Alors que je ne l’ai pas souhaité et que je ne me sentais pas destinée à cette situation. 

Je me débats, et pourtant ne parviens plus à lutter. Mes muscles se soudent entre eux et mes nerfs forment un réseau douloureux dans tout mon vulnérable corps sous ton commandement et pourtant je me ramollis. Je me soumet à ta volonté, victime de moi même, de mon fatalisme enfoui que tu m’imposes. Je me sens prisonnière de moi même. Tu m’arraches mes envies et mes projets, mes plaisirs et mes possibilités, mes proches et ma philanthropie. Tu me mets en position de captive, me prive et me violente. Je suis en manque de tout, et les détails se noie dans la masse. Et pourtant, j’ai tout, je pourrai tout avoir si tu me laissais du répit, prendre des directives. Et sournoisement, parfois, tu me laisses y croire, tu me laisses faire. J’ai la sensation de reprendre le contrôle sur moi même, je me sens encore faible et perdue, mais comme une lueur d’espoir s’installe en moi plus claire qu’avant. Et je crois à ton retrait, à ta capitulation, à ton départ, à la fin de ta folie qui pourrait amener la mienne. 

Et c’est quand je reprend le dessus, quand je sens en moi percer le courage de te repousser fermement dans tes retranchements où tu te tapissais autrefois et reprendre les rênes de ma vie, quand je sens un amélioration de ma volonté, c’est là que tu surgis de nouveau, m’assénant un coup violent de traitrise et me plongeant dans une colère et une douleur plus violente encore qu’avant. Et je me sens faible de nouveau, encore plus qu’à ta première apparition en tyran sur mon être. Je me sens impuissante, perdue et condamnée. 

Je cherche comment déjouer tes tours, comment t’utiliser à mon tour. C’est dans la souffrance que les plus beaux édifices ont été construits, dans la souffrance que les plus beaux poèmes ont été écrits et dans la souffrance que les plus grands ont péris. Peut être es tu une chance pour moi. Peut être me tortureras tu jusqu’à ce que je trouve ta véritable fonction, ton véritable message. Peut être que je souffre pour une bonne raison. Es tu le Mal Bien ou est ce juste une illusion que je me créée pour mieux te supporter encore? Je n’ai pourtant pas de talent aucunement. Je suis une piètre danseuse, pas assez souple, une guitariste bien médiocre si j’ose prétentieusement m’appeler de la sorte et n’arrive pas à me détacher de ce qui déjà a été fait; pour accompagner je chante très faux même quand je suis vraie, et j’écris avec du gros fil blanc et les coutures de mon écritures sont visibles aux yeux de tous. Je trouvais un bonheur avant dans ces disciplines, avant que tu ne me mettes en face de ma médiocrité. Mon seul espoir était les études, devenir quelqu’un de commun, mais quelqu’un tout de même. Mais tu me coupes toute envie, toute ambition et tu fais de moi une lâche, une flemmarde, une moins que rien. Et je rampe pour t’implorer de me donner une solution. Que dois je faire pour que tu me quittes ou bien que tu m’aides? 

Comment cette situation va prendre fin? Une fin doit arriver. Nous ne durerons pas éternellement ce combat intérieur toute ma vie. J’ai toujours été fière d’avoir vécue jusque là en mettant mes démons en cage. Je pensais que ce n’était qu’une petite métaphore commune pour désigner mes petites peurs, les imperfections qui sont en moi et font partie de ma personnalité, que je pensais avoir apprivoisées et domestiquées. Je pensais que tout le monde avait ce genre de démons, et que chacun vit avec ce Ça à l’intérieur, enchaîné et que ce n’est pas grave, même normal voir banal. Les angoisses et le stress sont des petits démons de la vie courante. Je pensais avoir surmonté ces handicaps et pouvoir aller de l’avant, en gardant la cage fermée. Seulement, il s’avère que désormais je n’ai plus les clés. Il s’avère aussi que c’est toi, l’autre en moi le Démon, à qui je refourguais tout ce que je n’acceptais pas, tout ce qui était désagréable. Et sagement tapit au fond de ta prison, tu as reçu toutes ces mauvaises ondes, tout ce mal, et tu l’as ressassé, digéré, dans le fond de mon inconscient, tu t’es approprié tout ce que je t’envoyais à mon insu et aujourd’hui, tu veux me faire payer, c’est le revers de la médaille que tu me craches droit au coeur. Et tous mes sens s’affolent et je m’effondre encore et encore. Et je perds totalement le contrôle. Et tu me rends certaines choses de ce que je refusais d’admettre. 

Notamment ma médiocrité. Tu me mets face à ma médiocrité, à ma vie ordinaire et ma personne on ne peut plus commune. Je suis au pied du mur, au pied du mur translucide qui sépare mon monde de chimères à celui de la réalité. Mon monde d’enfant à celui des adultes. Le mur entre le passé heureux et l’avenir incertain. Quoique tu me prives de voir et prévoir l’avenir. Car le mur est opaque à certains endroits et m’empêche de me rassurer. Je suis comme un cheval devant l’obstacle qui renâcle et recule, refusant de sauter. Ce que tu me murmures du fond de mon subconscient, du creux de moi, ne présage rien de bon dans cet au-delà que j’imaginais pourtant sûr et chaleureux. Je reste indécise et apeurée par ce qui arrivera si tu ne me quittes pas, et je n’arrive plus à envisager la vie après toi. Je n’ai plus de projet, plus de rêve réalisable. Je suis médiocre, dépressive, sans projet, complètement perdue dans ce monde qui m’est de plus en plus hostile malgré tout l’entourage qui s’occupe de moi avec amour, altruisme et sincérité. 

Et je fais n’importe quoi. Tu m’emmènes dans des contrées du Vice que je ne connaissais pas et que je ne pensais pas découvrir dans l’état second auquel je suis en proie depuis Toi. Je ne pensais pas que tu tirerais les ficelles qui m’articulent de manière si décalée. Je vais, je viens, je repars et je reviens sans savoir vraiment ce que je fais. Je dis oui quand je pense non, j’accepte quand la raison voudrait que je renonce. Tu m’amènes à vivre des chocs que je n’aurais peut être pas appréhendé de la même façon et au même moment sans toi. Et je marche dans les directions que tu me donnes, et j’espère même y trouver du réconfort quand je sais qu’il n’y a aucune logique à ces faits. 

Il va falloir t’exorciser, ou qu’enfin je parvienne à te maîtriser. Et pour cela je dois parler de toi à un neutre qui ne me jugera pas, ou se gardera bien de me le faire savoir. C’est dur de parler à un professionnel du mal être. Les démons comme toi ne lui font pas peur, et il sait quoi me dire. Seulement, c’est à moi de parler. Et c’est avec difficulté que je me confis sur des banalités qui pourtant bouleversent toute ma vie. C’est quand on pense avoir la vie banale de tout le monde et que ça aurait du continuer de cette façon qu’on réalise qu’on a la vie de personne et que les Démons doivent un jour ou l’autre quitter les barreaux qui les entraves et s’exprimer, laisser libre cours à leurs énergies, et achever de nous tirailler dans tous les sens de l’intérieur et nous mener aux limites de la folie dans une montagne russe de sentiments en cascade, trop grands et trop forts pour moi, trop douloureux surtout, trop d’un seul coup. Les laisser m’interdire, m’emprisonner dans des cercles vicieux de culpabilité, d’anéantissement, de violence intérieure, de perte d’estime envers soi même et de la perte d’espoir. Il faut laisser faire, et laisser le temps au temps. Tout est une question de temps. Mais le temps, c’est une notion vague, c’est un concept qui s’allonge, s’étire et peut être infini. Ou donner la perspective d’un début ou d’une finalité. Ça dépend de la dose de pessimisme. Et dans tout les cas, la perspective d’une souffrance perpétuelle est inconcevable, celle de la finalité se voit toujours repoussée comme le début à quelque chose de nouveau. Le temps est volatile, il n’est pas réel, et c’est à cet immatérialisme que revient la tâche de décider à quand mon mal être cessera. Mais c’est le conseil principal qu’on me donne, pour te laisser le temps de te lasser, et de passer. Et je résiste dans mon abandon. J’ai peur d’être standardisée, de passer à côté de quelque chose en me faisant traiter. J’ai peur de toi, mais j’ai aussi peur d’eux, des médicaments, des effets sur toi, mais aussi sur moi. Que vais je devenir après tout ça? 

Je n’avais pas les pieds sur terre, et maintenant il faudrait qu’un juste milieu s’installe pour que je ne sois plus sous terre. Toi l’autre en moi, je sais que tu es là à me faire souffrir, je te sens et je te ressens, douloureusement. Toi l’autre en moi, aide moi à redonner un sens à ma vie. »

Fin 2011, je tombe dans une profonde dépression. N’en déplaise à ceux qui pense qu’il suffit de se faire violence, se faire une carapace, que c’est un faiblesse, n’en déplaise à ceux qui ne savent pas ce que c’est et ne cherche pas à comprendre, j’ai eu des moments de crises, des moments de douleur intense au simple fait d’exister. Oui, j’ai saisi les ciseaux à plusieurs reprise en pensant que c’était la seule solution que de me taillader. Oui j’ai regardé à deux fois la plaquette. Un jour, bien après avoir remonté la pente, quand ce que je pensais être l’objet de mon retour à la vie est parti, j’ai refait une grosse crise, une crise qui m’a fait passer à l’acte. Et regretté quand ça s’arrête. Pensez-en ce que vous voudrez. Pensez que vous savez pourquoi. Pensez que vous avez les clés. Je ne vous conseille pas d’entrer dans ma tête. Une personne dépressive n’a pas besoin de solution facile, de formule magique. Juste d’une présence bienveillante. Pas de jugement ni de « c’est pas grave ». Dire que c’est pas grave, c’est annuler, c’est rejeter, ce n’est pas accepter le sentiment de l’autre et c’est insupportable.

Je suis à la fois choquée et peu surprise de retrouver la culpabilité, le perfectionnisme qui empêche de faire quoi que ce soit, tous les blocages encore bien ancrés 10 ans plus tard.

Alors le message que je cherche à faire passer, c’est qu’on peut s’en sortir. Qu’il n’y a pas de hiérarchisation de la douleur ni de légitimité ou non à se sentir mal. Et que la solution, c’est de ne pas être seul(e). D’avoir quelqu’un à côté qui ne juge pas, n’a pas peur et dit juste qu’il est là et que ça va passer. Pour vivre les choses avec des années d’écart. C’est toujours intense, toujours violent, mais on sait qu’il y a de la lumière qui pointe. Toujours.

Si tu te sens seul(e), mal, désorienté(e). Si tu as des pensées noires, surtout, surtout, ne reste pas comme ça. La vie vaut la peine d’être vécue. Il y a toujours des êtres sur terre pour t’apporter du bonheur, du soutien. Il y a toujours du soleil après la pluie.

Il faut savoir que, paradoxalement, il y a du monde pour nous aider tout autour, mais quand on sera plus fort, le bonheur viendra de toi seul. Et tu seras lumineux(se). Il faut y croire. Et se faire aider ! Amis, famille, Psychiatres, psychologues, infirmières, thérapeutes, hypnothérapeutes, CPAM…

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